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Albums/Mixtapes

Billy Blanka Bright Lights Dark Hadou

Based jump ultra glacé

Date de sortie : 14 février 2016

Jocelyn Anglemort, le 8 juin 2016

Le jeune label Ultra Glacial Records a décidé de célébrer l’amour le 14 février dernier avec les sorties surprises de deux K7 gratuites, BLDH avec Billy Blanka et l’album instrumental Beheld. Comme pour nous rappeler que ce soir-là, nous avons tous droit à 2 x 45mn de plaisir non tarifé.

Comme pour un premier rendez-vous , commençons d’abord par faire les présentations :

Aux manettes on trouve 88 ULTRA, boss du label Ultra Glacial, qui officie depuis plus d’une décennie sous l’appellation Kingston au sein de Blue Sky Black Death avec son comparse YOUNG GOD.

Le duo navigue entre Seattle, Washinghton et Oakland, brouillant les lignes entre rap, musique électronique et ambiant. A son actif, 4 albums studio, 12 projets collaboratifs et 9 tapes avec plusieurs artistes hétérogènes dont Myka 9, Key Nyata, Deniro Farrar, JMSN, Awol One ou Jedi Mind Trick, avant de trouver leur égérie en la personne du gremlin Nacho Picasso pour une mémorable trilogie entre 2011 et 2012, puis Stoned and Dethroned en 2015 où l’alchimie flirte avec la perfection.

Pour les projets qui nous concernent aujourd’hui, 88 ULTRA s’est allié à QREEPZ, un producteur et dj mystérieux qui compose une musique assez percutante, riche en basses et en mélodies « overtones ». Son album Seance déborde (un peu trop) de 808, d’épaisses basses et de synthés horrifiques pour un résultat éreintant qu’il nomme parfois witch-hop ou goth trap. Il lève ici le pied au contact de 88 Ultra au profit d’ambiances plus éthérées et mélancoliques.

Enfin, il y a Billy Blanka, anciennement J Byrd The Low Life, rappeur originaire de Beacon Hill à Seattle et cousin de Nacho Picasso. Au delà de l’anecdote people, la ressemblance est telle entre les deux rappeurs qu’il est parfois impossible de les différencier, Billy s’amusant à brouiller les pistes en invitant Nacho en featuring dès le premier morceau du projet ou en proposant un édit du Numbnuts  de son cousin, tube sorti en 2011.

Quel intérêt à cette entreprise de clonage alors ? D’abord pour pallier la déception causée par la mixtape Vampsterdam de Nacho sortie cette année, mais surtout parce que Blanka assure dans son rôle de stoner affable traînant ses journées devant la télé et ses nuits dans les rues de Seattle, la ville des « bust heads and clean clocks ».

En parfait low key singer, Blanka se fait discret mais vicieux, rapant les narines remplies de coton. Avec son cousin, il partage l’amour de l’autoportrait honnête et débridé, des rêves et des « missed chances. L’humour noir est aussi très présent et l’univers que Blanka décrit se rapproche de celui du film Ace Ventura : Une multitude de grosses farces mais mêlées à une ambiance au final assez glauque, remplie de personnages ambigus.

Sa voix abondamment filtrée forme un bloc compact avec la production. L’espace est équitablement réparti au départ, même si la présence du rappeur s’estompe parfois au fur et à mesure du morceau car, qu’on se le dise, c’est d’abord le travail de 88 Ultra qui saute aux yeux. Dérivant naturellement entre les univers (électronique, ambiant, r’n’b, chillwave, voir post-dubstep et ses voix pitchées) le producteur met en place une atmosphère unique et mélancolique en superposant des voix enfantines lointaines, de longues lignes de basses, des accords de guitares, de nappes synthétiques et une déferlante de cordes. Une sorte de Harry Fraud en deltaplane et bercé au chopped and screwed.

Extrêmement riche et d’une beauté quasi constante, la production permet à Blanka de déclamer ses sautes d’humeur, entre excitation et somnolence selon le produit absorbé, distillant avec minutie les refrains et préférant un rôle d’ectoplasme hantant le disque. Cela apporte au projet un aspect très “garage” ou indie rock, comme si tout ceci n’était que le résultat d’une session live sous cachetons où les boucles hypnotiques ne sont jamais figées et où Mackned propose de commencer la soirée vers 13h, celle de la veille n’ayant jamais vraiment prit fin, comme sur le délicieux Tuesday Afternoon :

On note aussi une certaine nostalgie tout au long du disque, dans les nappes de synthés 80’s de Hippy things ou ce sample de 8 Ball dans le morceau Put on the mask qui nous plonge de plein niveau de Donkey Kong sur SNES avec ces percus tropicales. Des expérimentations qui renvoient parfois à celles des Neptunes époque Hell hath no fury de Clipse (dont le Mr. Me Too est d’ailleurs samplé ici), avec ses drums minimalistes. Différence cependant, ici il n’est pas question de vendre la drogue mais bien de la consommer. En bon esthète du stupéfiants, Blanka n’est pas du genre à partager, préférant planer très haut en solitaire pour regarder la lumière se consumer doucement.

La musique du label Ultra Glacial est un vaste désert à explorer, une longue chute libre pendant laquelle on aurait tort de ne pas apprécier la splendeur de la vue, mais qui n’oublie pas de nous rappeler qu’en cas de pépins nous ne laisserons derrière nous qu’un stupide cadavre glacé.

Pour aller plus loin :
Young God - ...but he who causes the darkness recueil instrumental sous influences shoegaze, gracieux et essentiel.
Greenova South - Kome Ryde With Us, cloud rap composé de 50% de Main Attrakionz, de Young God à la production et de featurings de Mr Sche et Lil Flip.


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